Ce qui nous met en colère…

Hier, des passagers du métro londonien ont agressé des militants d’Extinction-Rebellion qui ralentissait la circulation des rames. Celles/ceux qui se battent pour faire entendre les enjeux du dérèglement climatique se sont opposé(e)s à celles/ceux qui voulaient arriver à l’heure au travail, à leur rendez-vous etc… A Londres, les passagers ont lancé des projectiles aux militants et les ont insulté. Une version moderne de la lapidation sans doute…La fin tragique en moins. Heureusement. Vas-y! Choisis ton camp, semble nous dire ce fait divers.

Mais qu’est-ce qui peut bien nous rentrer sous la peau à ce point pour en arriver de telles extrémités? Comment se fait-il que la violence physique et/ou verbale soit retenue comme la meilleure solution en cas de frustration? Comment désamorcer cet élan destructeur pour traverser autrement les épreuves du quotidien?

Oeil pour Oeil…

Ce qui me frappe le plus dans cette histoire c’est la colère. Nous en sommes arrivés au point où il est « normal » d’agresser quelqu’un qui se place en travers de notre chemin, y compris quand nous allons « au turbin » le matin. N’oublions pas, tout de même, que pour bon nombre d’entre nous, « aller bosser » n’est pas une partie de plaisir. Mais ça paye les factures. Et nous pensons que nous ne pouvons pas faire autrement.

Remarque, peut-être que, dans le métro de Londres, il y avait uniquement des personnes heureuses d’aller travailler. Et que ces militants d’Extinction-Rebellion ont, sans le savoir, piétiné leur enthousiasme. C’est possible, en effet. Il faut reconnaître que voir son enthousiasme saccagé n’est pas très agréable!

Et la palme de celui/celle qui souffre le plus est attribuée à….

Alors, nous en sommes là. Nous « pétons des plombs ». Nous comparons nos difficultés, frustrations ou douleurs à celles des autres. Nous sommes tellement déconnectés de nous-mêmes que nous avons besoin de l’autre pour évaluer notre niveau de marasme.

Y-a-t-il donc une échelle de classification des frustrations tacitement connue de tous quelque part? J’imagine que oui, sinon comment expliquer que des êtres humains, supposés nés libres et égaux en droits et en devoirs, puissent se traiter de la sorte. Alors c’est quoi le barème dans ce cas? Deux points pour un geste déplacé, cinq pour ne bousculade et dix pour nous avoir empêché de tourner en rond ? Non-non! Visiblement, nous avons dépassé ce stade…Nous en sommes à nous jeter des objets à la figure en nous traitant de noms d’oiseaux pour avoir été ralenti(e)s dans notre course contre le temps.

En fait, si nous estimons notre total de points plus élevé que celui du voisin et qu’il/elle ose nous freiner de quelque sorte que ce soit, nous nous octroyons sans vergogne le droit de menacer son intégrité physique. Le droit d’éliminer la menace en gros.

Le jeu de « qui a raison? »

Alors regardons deux secondes ce qui nous met dans de tels états de colère. Est-ce la peur? La frustration? L’injustice? L’ignorance? etc…Ou peut-être tout cela à la fois.

Les militants d’Extinction-Rebellion ignoraient le détail des enjeux importants prévus dans la journée des passagers. Ils ne se sont peut-être même pas posé la question de savoir s’il était juste de les « prendre en otage » de la sorte. Ou peut-être que si, mais ils l’ont fait quand même.

Ils se sont peut-être dit que leur nombre de points à eux était bien plus importants que celui des passagers…Ou qu’alerter sur l’avenir de notre planète justifiait d’employer « les grands moyens ». D’autant plus que le réchauffement climatique concerne chacun d’entre nous. Ça fait peur de voir un grand chamboulement arriver et de constater que tout le monde s’en fout, non?

Etre lanceur d’alerte n’est pas un job facile de nos jours. Ces militants préféreraient probablement rester insouciants face à la situation de la planète. De même, certains passagers sont peut-être déjà sensibilisés au dérèglement climatique mais n’agissent pas de la même façon pour remédier au problème. Qui dit qu’ils ne passent pas leurs weekends à trouver des solutions de vie alternatives, tout en réservant la semaine à leurs autres obligations?

Ça fait beaucoup d’hypothèses, impossibles a vérifier, surtout quand la communication n’existe plus, ou se fait dans la violence.

Comme des enfants…

Outre le fait de ne pas être entendu et compris dans ses peurs, ses souffrances…etc, ce qui nous met en colère c’est que seules les actions « coup de poings » permettent d’attirer l’attention sur une problématique.

En fait, ce qui nous met en colère est la même raison que ce qui rend nos enfants turbulents lorsqu’ils trouvent qu’on ne fait pas assez attention à eux. Ils créent des problèmes pour que leurs parents s’investissent dans la relation et arbitre l’objet du litige.

C’est ce que nos dirigeants ne font pas. Ils ne font plus depuis longtemps. Les actualités croulent sous les polémiques créées de toutes pièces sur des sujets dérisoires. Ceux qui nous dirigent font diversion avec la complicité de ceux qui nous informent! Si tu as des enfants, tu vois sans doute de quoi je parle. Et tu sais que cette technique a fait ses preuves…

Courir partout…pour aller nulle part

Force est de constater que nous sommes comme des hamsters qui courent sur leurs roues! Combien de fois entendons-nous « je n’ai pas le temps » dans une journée? Pire, combien de fois le pensons-nous? Alors quand des « pignoufs » bloquent notre métro et nous empêchent de faire nos affaires, pas question de leur donner des circonstances atténuantes puisque nous n’avons pas le temps pour çà.

Nous avons appris à aller à l’essentiel, à choisir notre camps tout de suite. Et nous sommes continuellement stimulé(e)s et encouragé(e)s dans ce mode de fonctionnement.

Reposer les pieds sur terre…

Tant que je m’en prends aux autres parce qu’ils ralentissent ma course contre la montre, je ne réfléchis pas au problème de fond. Et surtout, à l’inverse des enfants, je ne sollicite pas mes dirigeants pour leur poser les questions qui fâchent.

Avez-vous remarqué que lorsque nous acceptons les choses telles qu’elles sont, y compris sur les sujets qui nous dérangent, soudain les barrières se lèvent? C’est comme si la liberté de chacun reprenait immédiatement ses droits.

Alors prenons le temps de nous souvenir que les autres ont aussi leur lot de peurs, de frustrations, d’injustice et d’ignorance etc…Souvenons-nous que c’est souvent en réaction à la contradiction qu’émergent les plus belles histoires. Sachons voir et accepter dans les travers de l’autre le reflet de nos propres limites. Notre véritable choix n’est pas de décider qui a raison mais de quelle manière nous voulons expérimenter l’existence ensemble.

Tu l’auras compris tant que nous galopons sans conscience de l’illusion de nos vies, il est impossible de trouver la paix. La vie est courte sur cette Terre et, qu’on le veuille ou non, celles/ceux qui nous agacent en font également partie… Compte-tenu de ce qui se profile à l’horizon, n’y-a-t-il pas mieux à faire que se sauter à la gorge à la moindre contrariété?

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